Il vient dans les bouleversements du monde
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L’Avent, la venue, l’avènement…
Attendre, accueillir, se préparer…
Ça parle de la venue de Jésus à Noël, mais plus encore d’un évènement inouï qu’aucun homme n’aurait imaginé : l’incarnation d’un Dieu dans notre chair et dans la vie du monde…
Il me semble que certains chrétiens qui cherchent encore Dieu au ciel n’ont toujours pas perçu l’inouï d’un Dieu au cœur du monde. Je m’interroge quand j’ai l’impression que, pour certains chrétiens, l’essentiel de la vie chrétienne se déroule à l’église. Alors que la foi chrétienne repose sur un Dieu devenu humain, un Dieu incarné au cœur du monde, un Jésus qui parcourait les villes et les campagnes pour rejoindre les hommes et les femmes dans leurs maladies, dans leurs attentes…
Je n’ai rien contre le fait d’aller à l’église, de prier, de chanter des louanges, d’aller à la messe, de réciter le chapelet. Mais si la vie chrétienne se résout à cela, si l’essentiel de la vie chrétienne consiste à se réfugier dans les églises et parfois à dénoncer un monde dangereux, ça dénature l’évangile et la Bonne Nouvelle d’un Dieu qui aime le monde, qui vient s’incarner au cœur du monde tel qu’il est, pour le rejoindre jusque dans ses maladies et ses misères, un Dieu qui sauve le monde aujourd’hui.
En lisant l’Evangile, avez-vous remarqué que Jésus est bien plus souvent au milieu des hommes que dans les Synagogues de son époque, qu’il chemine en permanence dans les villes, les campagnes et les déserts : il y rencontre les pharisiens, les publicains, les femmes adultères, les malades, les étrangers… et qu’il dénonce souvent les scribes et les pharisiens des Synagogues qui se croient justes et veulent dicter au monde leurs lois et leur morale ?
Alors en ce temps de l’Avent, je vais moi aussi sortir des églises. Je ne vais pas vous proposer des actes religieux pour préparer Noël… Je n’ai rien contre les crèches, mais je ne vais pas vous décrire la crèche de jadis.
Je vais aller avec vous visiter les crèches d’aujourd’hui dans lesquelles Jésus vient naître…
Ces crèches d’aujourd’hui : nos familles traversées d’amour et de violence…
Ces crèches d’aujourd’hui : notre société, nos associations, nos entreprises, traversées d’injustice, de prises de pouvoir illégitimes mais aussi d’engagement pour soutenir les rejetés et les plus démunis…
Ces crèches d’aujourd’hui, sur les terrains de guerre en Ukraine, en Israël et à Gaza, et aussi dans tous les pays de dictature, d’exploitation de l’homme par l’homme et d’esclavage.
Ces crèches d’aujourd’hui, traversées de ténèbres et d’horreur et aussi d’espoir et d’engagements pour la paix…
C’est bien dans ces crèches d’aujourd’hui, plus que dans le papier rocher de nos églises, que Jésus vient naître aujourd’hui
Je vous propose d’aller ensemble au cœur de ce monde, mais à la lumière de l’Evangile de chacun des 4 dimanches de l’Avent. Je vous propose de nous interroger ensemble sur leur actualité au cœur de notre monde et au cœur de chacun de nous, en 2024.
Et d’abord en ce premier dimanche de l’Avent, l’Evangile nous présente un Dieu qui vient…
1. Au cœur des bouleversements du monde
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (21, 25-28.34-36)
En ce temps-là,Jésus parlait à ses disciples de sa venue :
Nous voilà tout de suite en Avent, accueillant la « venue » de Jésus.
Il ne s’agit pas d’abord de la fin du monde…
Ecoutez combien ce que dit Jésus ressemble à notre société bousculée et bouleversée :
« Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles.Sur terre, les nations seront affolées et désemparéespar le fracas de la mer et des flots.Les hommes mourront de peurdans l’attente de ce qui doit arriver au monde,car les puissances des cieux seront ébranlées.
La peur des hommes devant les fracas de la mer et des flots : les pluies diluviennes, les morts suite aux pluies diluviennes et aux inondations, les catastrophes météorologiques un peu partout dans le monde (inondations, glissements de terrain, tremblements de terre…), chez nous les cyclones.
Et aussi les hommes et les femmes qui meurent de peur, et qui meurent réellement sous le fracas des armes, en Ukraine, en Israël et à Gaza, dans les prisons des régimes terroristes, dans les violences subies par tous ceux et celles qui veulent prendre le pouvoir, dans les désespoirs de celles et ceux qui se sentent rejetés, parfois jusqu’au suicide…
Alors, on verra le Fils de l’homme venir dans une nuée,avec puissance et grande gloire.
C’est bien là, au cœur de ces bouleversements, que vient le Fils de l’Homme !
Attention, vous qui ne cherchez Dieu que dans l’intime de vos prières, dans l’adoration par vos chants de louange, dans ces lieux protégés que sont les églises… Rappelez-vous que le Fils de l’Homme vient d’abord aujourd’hui sur les champs de bataille, dans ce monde bouleversé et parfois dévasté… C’est là qu’il vient… Et si vous allez prier et chanter à l’église, c’est uniquement pour dire merci d’avoir pu le reconnaître dans les fracas du monde, dans les bouleversements de vos vies.
C’est la première Bonne nouvelle, pour tous ceux qui croient que Dieu les a abandonnés ou veut les punir par la violence du monde : dans ce monde déchiré, le Dieu de l’Incarnation vient prendre le visage des victimes, des souffrants, et de toutes celles et tous ceux qui cherchent à promouvoir la justice, le respect, la réconciliation, la paix…
Quand ces événements commenceront,redressez-vous et relevez la tête,car votre rédemption approche.
« Redressez-vous et relevez la tête ! » Le plus souvent, tous ces événements d’un monde déchiré déclenchent nos peurs, nos lamentations, nos plaintes, nos méfiances, nos rejets de l’étranger et de tout ce qui fait peur… Tous ces évènements nous font nous recroqueviller dans du chacun pour soi, du sauf-qui-peut, de l’aigreur, du regret…
Vivre l’Avent, c’est rester au cœur de ces évènements difficiles en se redressant et en relevant la tête. Il ne s’agit pas d’être de doux rêveurs, ni de traverser les champs de bataille comme des idéalistes qui croiraient que « tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ».
Se redresser et relever la tête… Mais comment faire ?
remettre du solidaire là où il y a du chacun pour soi…
choisir le seul pouvoir d’un cœur qui relève plutôt que les prises de pouvoir qui rejettent et écrasent…
écouter l’autre et le respecter dans sa différence plutôt que de toujours vouloir avoir raison…
oser dire mes émotions et mes besoins plutôt que ruminer mon aigreur ou juger les autres…
faire confiance à mes ressources et à celles de mes voisins plutôt que de toujours attendre d’être assisté par les services sociaux ou de demander à Dieu de résoudre mes problèmes…
contribuer à construire des ponts plutôt que de creuser des abîmes de haine…
chercher à voir dans le monde les gestes de fraternité plutôt que se laisser aveugler par les actes violents…
Etc.
Tenez-vous sur vos gardes, de crainte que votre cœur ne s’alourdisse dans les beuveries, l’ivresse et les soucis de la vie, et que ce jour-là ne tombe sur vous à l’improviste comme un filet ;il s’abattra, en effet, sur tous les habitants de la terre entière.
Nos cœurs alourdis par l’ivresse et les soucis de la vie…
Quand l’alcool et la drogue nous font oublier nos soucis ou nos désespoirs, sans jamais les résoudre…
Quand les soucis de la vie nous isolent des autres, nous envahissent de stress, de doutes, de pertes de repères…
Quand nous perdons tout espoir pour notre avenir et celui de nos enfants…
Mais comment faire pour ne pas sombrer ? Un seul chemin :
Ne reste pas seul avec tes problèmes, sache que d’autres aussi sont dans la difficulté… Serrez-vous les coudes !
Cherche une personne de confiance et va déposer auprès d’elle ce qui est trop lourd…
Rappelle-toi qu’en toi se trouve une pépite que rien ni personne ne peut détruire, et pars à sa recherche en toi, soutenu par cette personne de confiance, plutôt que de tourner en rond et te noyer dans tes malheurs…
Rappelle-toi que les cyclones détruisent, mais aussi qu’ils finissent par disparaître et qu’ils laissent le champ libre à la reconstruction…
Restez éveillés et priez en tout temps :ainsi vous aurez la force d’échapper à tout ce qui doit arriver, et de vous tenir debout devant le Fils de l’homme. »
Bon temps de l’Avent, à l’aventure au cœur du monde !
Sa venue c’est aujourd’hui,
dans ces crèches que sont ma vie quotidienne et la vie du monde.
La crèche de nos églises et la messe de minuit n’auront de sens
que si nous avons reconnu sa venue au cœur du monde et de la société,
dans nos espoirs, dans le regard de nos voisins,
dans les petits gestes du quotidien qui disent non aux fracas du monde.
Redressez-vous, relevez la tête !Tenez-vous sur vos gardes ! restez éveillés
Pour tenir debout dans ce monde devant le Fils de l’Homme !
Marc THOMAS
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