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Sortir des blessures d'enfance


La semaine dernière, nous écoutions un texte de Cindy Pinchart publié sur Facebook, évoquant ces blessures intérieures portées par tant de femmes et qui les perturbent souvent toute la durée de leur vie.

 

Vous pouvez retrouver ce texte ou l’enregistrement audio de ce texte sur mon Blog au lien suivant : www.parole-semee.com/post/blessure-d-enfance

 

Nous évoquions aussi le fait que bien des hommes pourraient traduire dans leur réalité masculine des blessures souvent très anciennes qui impactent durablement leur vie d’adulte. Combien de postures violentes ou d’échecs manifestent parfois de façon catastrophique des blessures non désinfectées qui restent à vif.

 

C’est déjà un grand progrès vers la libération de pouvoir reconnaître et nommer ces blessures d’enfance. Mais la question reste entière : comment en sortir ? Faut-il se résigner à « faire avec » tout au long de notre ? Ou y a-t-il des chemins possibles pour désinfecter ces blessures, les cicatriser, et vivre enfin libérés de ces poids ou de ces entraves ?

 

C’est à ces questions que je voudrais répondre aujourd’hui, non pas de façon théorique car chacun connaît la théorie, mais sait que de la théorie à la pratique il y a parfois un abîme infranchissable.

 

Je voudrais donc répondre à cette question « comment se libérer de nos blessures du passé ? » par l’expérience vécue d’une personne que j’accompagne et qui est en train de faire ce chemin. Il s’agit d’un exemple, je pourrais en décrire d’autres qui prouveraient qu’elle n’est pas une exception et que cette libération est à la portée de chacun.

 

Et puis, si je peux écrire cela aujourd’hui, c’est parce que moi aussi j’ai fait ce travail sur moi, accompagné par des professionnels, de me libérer de blessures de mon enfance et de certaines entraves. Je suis d’ailleurs en train d’en faire un livre.

 

Je vous invite donc à lire ou écouter la suite, non comme l’histoire d’un autre à admirer, mais comme la possibilité de votre propre histoire, qui que vous soyez !


 

C’est l’histoire de Solange (prénom modifié) que j’accompagne en visio depuis plusieurs mois. Elle m’évoque souvent combien une blessure d’enfance a pesé sur elle tout au long de sa vie, et reste encore un frein, un perturbateur, une souffrance dans de nombreuses situations actuelles. Et pourtant Solange est retraitée. Tant d’années à souffrir d’une blessure d’enfance !

 

Sa blessure d’enfance ? Des parents en conflit parfois violent. La petite fille qu’elle était alors était terrorisée à chaque éclat de voix. Elle faisait tout pour tenter d’apaiser la violence de ses parents. Et si elle n’y parvenait pas, elle se sentait coupable. Personne ne lui a dit alors que ce n’était pas le rôle d’une petite fille d’être la médiatrice de ses parents. Elle prenait donc tout en pleine face, elle ingurgitait la violence et n’était en rien outillée pour la traiter, la déconnecter, l’apaiser. Elle ne pouvait expulser ce trop plein de violence qu’en se mettant en colère… Colères que sa mère lui reprochait évidemment et dont elle finissait par se culpabiliser.

 

Sa blessure d’enfance a continué à s’agrandir quelques temps après, quand sa mère finalement séparée était déprimée et dans la plainte, quand sa mère voulait sans cesse que sa fille prenne soin d’elle. Alors Solange pensait qu’elle devait consoler sa maman quand elle était triste, qu’elle devait être calme quand sa mère était en colère, qu’elle devait soigner sa mère quand elle était malade. Solange passait sa vie à prendre soin de sa mère en détresse. Et Solange devait se taire quand sa mère épuisée passait ses nerfs sur elle.

 

Solange ne savait pas alors que c’était le monde à l’envers, qu’une petite fille a besoin que ses parents prennent soin d’elle, et qu’une petite fille ne peut pas être en permanence l’aidante de sa mère.

 

De ce fait, depuis toujours, Solange a construit sa vie d’adulte sur cette posture : elle pense toujours qu’elle est là pour prendre soin des autres, et que c’est de sa faute si elle ne réussit pas à les apaiser. Solange a construit ses relations sur la soumission aux besoins des autres sans jamais prendre soin de ses propres besoins.

 

Aujourd’hui, Solange est retraitée et continue à accompagner sa maman qui est en maison de retraite. Elle se sent obligée de répondre sans délai à toutes les demandes de sa mère, obligée de laisser tout ce qu’elle est en train de faire pour répondre à ses appels, parfois à ses caprices, jusqu’à l’insupportable. Mais elle se croit obligée de le faire, oubliant même que ce que sa mère lui demande pourrait légitimement être traité par le personnel de la maison de retraite. Mais depuis son enfance, Solange est guidée par l’injonction de devoir régler les problèmes de sa mère. C’est pour elle comme un pilote automatique. Y déroger déclencherait immédiatement une culpabilité, elle aussi insupportable.

 

Alors Solange me parle des colères qu’elle exprime devant sa mère tellement elle n’en peut plus de se soumettre en permanence à ses demandes. Les mêmes colères que la petite fille de jadis, soupapes de sécurité de l’insupportable.

 

Bien sûr, Solange se culpabilise de ses colères devant sa mère, comme elle s’en culpabilisait jadis. Après avoir constaté avec Solange que ses colères ne résolvaient rien, je lui propose pourtant de regarder ses colères avec empathie : plutôt que de s’en culpabiliser, chercher ce qu’il y a de légitime dans ces colères, de quels messages elles sont porteuses.

 

Et c’est ainsi qu’on commence à traiter ses blessures d’enfance : les regarder avec empathie, non pas pour dire « c’est bien ou c’est mal », mais simplement pour en connaître la cause, l’origine, et pour les regarder sans jugement.

 

Solange note vite qu’elle explose en colère quand elle n’en peut plus, quand elle est arrivée aux limites du supportable. Solange repère vite que les colères d’aujourd’hui sont les mêmes que celles de son enfance, quand la petite fille se sentait écrasée et démunie devant la violence ou la détresse de ses parents. Et Solange pointe enfin la légitimité de ces colères, pour une petite fille qui aurait eu au contraire besoin que quelqu’un prenne soin d’elle.

 

Et pourtant, ce n’est pas parce que ses colères sont légitimes qu’elles doivent être projetées sur sa mère en fin de vie, d’autant plus que celle-ci est entrée depuis peu dans un état de confusion lié à son âge qui empêche tout dialogue clair.

 

Alors Solange doit-elle encore ravaler ses colères légitimes et rester soumise aux demandes et caprices de sa mère ? Evidemment non ! Mais alors comment s’en sortir ?

 

Dans l’accompagnement, nous avons trouvé trois étapes :

 

1.    Que Solange apprenne à prendre soin d’elle. Solange a légitimement droit au prendre soin qui lui a manqué. L’enfant ne pouvait pas prendre soin d’elle, c’était le rôle de ses parents. Solange, aujourd’hui adulte, peut apprendre à prendre soin d’elle. « Facile à dire, me dit-elle, mais comment m’y prendre ? » Nous cherchons ensemble : écouter ses besoins et ses désirs et oser les satisfaire ; nommer l’insupportable et apprendre à se retirer pour s’en protéger ; trouver des personnes de confiance auprès de qui elle pourra être accueillie, entendue, reconnue, soutenue… Des personnes de confiance qui aimeront prendre soin d’elle aussi.

 

2.    Solange a un travail de deuil à faire : nommer les manquements de ses parents, constater qu’elle n’a jamais rien pu y changer, reconnaître, sans excuser, que ses parents n’avaient pas la capacité de remplir auprès d’elle leur rôle protecteur de parents. Consentir à cette absence et aux handicaps qui s’en sont suivis, sans s’enfermer dans une posture de victime. Et renoncer à la rancœur, aux accusations qui ne feraient que renforcer son aigreur et sa colère. Là aussi, facile à dire, mais comment faire ? Quitter les ruminations et les regrets qui ne font qu’envenimer la blessure. Quitter le statut quo : « c’est comme cela, ça ne changera jamais » qui ne font que nous immobiliser dans l’état souffrant sans rééducation possible. Et puis choisir de vivre enfin en mettant en œuvre le 3ème point.

 

3.    Solange peut aujourd’hui chercher ailleurs le soutien et la reconnaissance qu’elle n’a pas eus : non seulement elle peut le chercher, mais elle y a droit et peut s’autoriser à aller le demander. Cet « ailleurs », ce sont les amis avec qui elle sent une relation fluide et chaleureuse, ce sont les engagements qu’elle prend dans des lieux de loisirs partagés, dans des ateliers d’écriture, auprès d’enfants en difficulté, dans des randonnées avec des proches… C’est aussi la clarification de sa relation de couple où elle s’est trouvée jusqu’à présent très (trop) à l’écoute des besoins et des limites de son conjoint.

 

Ces trois étapes nécessitent de l’énergie et un investissement décapant qui peut lui permettre de déverrouiller des modes de réponse automatiques venus de son passé. C’est donc décapant, mais c’est tellement libérateur !

 

Et vous, amis lecteurs et auditeurs ?

Cette histoire de Solange a-t-elle fait résonner la vôtre ?

Êtes-vous prêt, chacun dans votre contexte et à votre manière

à prendre soin de vous ?

à faire le deuil de ce qui ne peut plus être changé ?

à chercher la vie là où elle se trouve ?

 

Je vous le souhaite, car je sais par expérience que…

…c’est possible pour chacune et chacun !


PS. J’ai envoyé ce texte à « Solange », par respect pour elle dont je décrivais le chemin, et pour qu’elle me donne l’autorisation de le publier (en changeant son vrai prénom). Voici la réaction de Solange :


Quelques impressions après la lecture du texte concernant Solange.

D'abord une grande émotion parce que lire un peu de son histoire c'est pas rien !!

Ensuite une envie de dire, voire de dire fort, voire de crier :

mais pourquoi je ne prends pas soin de moi !?

Une prise de conscience de là où j'en suis ...

 

Et puis aujourd'hui, la lecture du texte me fait prendre tout à coup de la hauteur sur ce que je vis, sur le déroulé de ma vie, comme si j'étais soudain sur une Montgolfière et que je pouvais me voir vivre ... avec empathie ... Ouf ! Enfin ! et aussi qu'il y a du possible pour changer, transformer ...

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Voilà ce que ça fait de lire son histoire sur une feuille de papier.

Merci Marc.

 

Peut-être que ce que j'écris là pourrait aider d'autres personnes.

 

Merci « Solange » !

 


Marc THOMAS

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