Marc THOMAS
Quelle tolérance ?
Dans une société de « chacun pour soi » et de violence, la tolérance est une belle valeur… mais c’est aussi un mot et une attitude ambigus…
La tolérance – selon une Déclaration de l'Unesco de 1995 – est « le respect, l'acceptation et l'appréciation de la richesse et de la diversité des cultures de notre monde, de nos modes d'expression et de nos manières d'exprimer notre qualité d'êtres humains. Elle est encouragée par la connaissance, l'ouverture d'esprit, la communication et la liberté de pensée, de conscience et de croyance. […] La pratique de la tolérance signifie que chacun a le libre choix de ses convictions et accepte que l'autre jouisse de la même liberté. Elle signifie l'acceptation du fait que les êtres humains, qui se caractérisent naturellement par la diversité de leur aspect physique, de leur situation, de leur mode d'expression, de leurs comportements et de leurs valeurs, ont le droit de vivre en paix et d'être tels qu'ils sont. Elle signifie également que nul ne doit imposer ses opinions à autrui ».
Unesco (United Nations Educational, Scientific and Cultural Organisation), Vingt-huitième session de la Conférence générale, Déclaration de principes sur la tolérance, 16 novembre 1995, article premier.
CHACUN POUR SOI, TENSIONS et TOLÉRANCE
Quand nous sortons dans la rue, nous apprenons la tolérance : tolérer le piéton qui vient en face de moi sur le trottoir, c’est se décaler mutuellement pour passer à côté.
Rouler en voiture sur la route, c’est s’adapter mutuellement aux véhicules qui viennent en face ou qui roulent devant moi…S’arrêter au feu rouge, c’est laisser passer l’autre, chacun son tour, pour circuler tous en sécurité.
Nous savons tous qu’il y a des moments où cette tolérance du vivre ensemble nous impatiente ou nous énerve. Nous savons tous que certains, et nous parfois, sont prêts à bousculer, à doubler même sans visibilité, à franchir les feux rouges…
Dans les relations humaines, le chacun pour soi et le vivre ensemble sont les deux opposés entre lesquels se déroule la vie sociale. Intolérance, chacun pour soi, manque de respect, domination, racisme, violence, exploitation des uns par les autres… ou tolérance, solidarité, respect, valorisation de la diversité, dialogue, équité, complémentarité… C’est au quotidien que nous construisons la tolérance en choisissant notre posture, que nous subissons les conséquences de l’intolérance et du chacun pour soi.
Dans la vie politique, quels sont les partis qui affirment leurs convictions en respectant les convictions différentes des autres ? Pourquoi face aux violences sociales récentes, chacun a cherché à les instrumentaliser pour dénoncer les torts des autres ? Pourquoi n’est-il pas possible de chercher ensemble des solutions en valorisant les diversités idéologiques de chacun ? Faut-il attendre le terrorisme ou la guerre pour retrouver l’union nationale ?
Tolérance… QUELLE TOLÉRANCE ?
Non à cette intolérance qui rejette, qui veut avoir raison, qui impose et domine, qui juge, qui dévalorise ou se moque…
Non à cette tolérance qui serait acceptation silencieuse de l’inacceptable, laisser faire, conformisme, soumission, compromission, complicité, peur de blesser ou d’être montré du doigt.
Oui à la vraie tolérance qui est respect, bienveillance, accueil de l’autre tel qu’il est, ouverture à la diversité, enrichissement des différences, complémentarité, dialogue, négociation, recherche de solutions nouvelles…
Mais aussi : oui à la vraie tolérance qui est aussi sincérité, affirmation de mes convictions et de mes choix tout en écoutant ceux de l’autre, capacité à dire mon désaccord sans juger ni rejeter les personnes, capacité à dire non à l’inacceptable avec fermeté et sans violence, volonté de ne jamais réduire la personne aux actes qu’elle pose.
TROP DE TOLÉRANCE TUE L’AMOUR!
par Diane GAGNON, conférencière, animatrice, coach et auteure.
Une phrase difficile, j’en conviens ! Mais combien de fois avons-nous tout toléré au nom de l’Amour pour réaliser qu’au final nous nous sommes reniés corps et âme pour que la relation fonctionne ?
Si nous avons toléré l’intolérable trop longtemps, si nous avons « ravalé » nos irritations, nos colères, nos chagrins trop souvent, nous finissons par perdre d’abord l’amour de soi, puis nous réalisons que notre amour pour l’autre s’effrite lui aussi. Car comment aimer l’autre quand on ne s’aime plus ?
Quand nous acceptons, consciemment ou non, d’être blessés tant de fois et de tout tolérer pour sauver la relation, nous ne réalisons pas toujours qu’au contraire, nous sommes en train de contribuer nous aussi à détruire la relation.
Car une relation qui se nourrit d’abus et de non-dits est vouée à l’échec dès le départ. Une relation, quelle qu’elle soit, qui favorise une acceptation totale, malgré le manque de respect, malgré le manque de compassion, malgré la violence sournoise qui s’y glisse, n’est pas une relation basée sur l’amour : c’est une relation basée sur la peur. La peur de perdre l’autre, la peur de se retrouver seul, la peur de paraître une mauvaise personne si on ose enfin dire ce qui nous blesse.
Aucune relation ne peut survivre aux silences, au manque de transparence, à la violence, au contrôle. La personne qui tolère et qui se tait participe aussi, par ce que l’on appelle la passivité, à détruire la relation, même si, au contraire, elle croit tout faire pour la sauver.
Peut-être vaut-il mieux avoir un peu moins de tolérance envers l’autre et plus de bienveillance envers soi-même ?
Et si on rétablissait un équilibre justement entre la tolérance face aux agissements de l’autre et la bienveillance envers nous-mêmes ?
Car tant que nous acceptons l’inacceptable, nous détruisons notre estime de soi. Nous renions ce que nous sommes, nous minons notre confiance en nous. En gardant en tête de maintenir un haut niveau de bienveillance envers soi-même, nous aurons peut-être plus de facilité à mettre nos limites chaque fois qu’il le faut.
Car nous ne sommes jamais gagnants
dans une relation où nous rampons.
Si vous vous reconnaissez dans ce texte, relisez-le, retrouvez les phrases qui vous ont particulièrement touché, osez les mettre en pratique, osez aller en parler à une personne de confiance, osez la bienveillance vis-à-vis de vous-mêmes : c’est la seule manière de sauver la relation, de sauver votre vie, d’être enfin ce que vous êtes.
TOLÉRER L’INTOLÉRABLE NOUS TUE
par Steve Pavlina
Quand vous remplissez votre vie d’énergies que vous devez tolérer, vous vous empêchez d’attirer ce que vous voulez vraiment. Plus vous tolérez d’incompatibilités dans votre vie, moins vous serez capable d’attirer et de profiter de compatibilités. Continuez à faire ça pendant des années, et vous vous noierez dans une vie qui vous semblera totalement faussée.
(…) Quand vous résistez à ce qui vous entoure, vous ne pouvez pas créer et attirer ce que vous voulez. La résistance que vous ressentez agit comme un bouton de suppression vis-à-vis de toutes vos meilleures intentions.
TOLÉRANCE : Quelques phrases de la Bible
Rm 2, 1
Toi, l’homme qui juge, tu n’as aucune excuse, qui que tu sois : quand tu juges les autres, tu te condamnes toi-même car tu fais comme eux, toi qui juges.
Eph 4, 2
ayez beaucoup d’humilité, de douceur et de patience, supportez-vous les uns les autres avec amour.
Ph 2, 1-4
S’il est vrai que, dans le Christ, on se réconforte les uns les autres, si l’on s’encourage avec amour, si l’on est en communion dans l’Esprit, si l’on a de la tendresse et de la compassion, alors, pour que ma joie soit complète, ayez les mêmes dispositions, le même amour, les mêmes sentiments ; recherchez l’unité. Ne soyez jamais intrigants ni vaniteux, mais ayez assez d’humilité pour estimer les autres supérieurs à vous-mêmes. Que chacun de vous ne soit pas préoccupé de ses propres intérêts ; pensez aussi à ceux des autres.
Jc 3, 16-17
La jalousie et les rivalités mènent au désordre et à toutes sortes d’actions malfaisantes. Au contraire, la sagesse qui vient d’en haut est d’abord pure, puis pacifique, bienveillante, conciliante, pleine de miséricorde et féconde en bons fruits, sans parti pris, sans hypocrisie.
Vivons donc cette tolérance
pleine de respect, de bienveillance,
d’amour pour soi, d’amour pour l’autre
Marc THOMAS
Sculpture de Gudmar Olovson
Jardin de l’Amour – Château de Cheverny
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